Chaque mot est tout d’abord porteur du sens étymologique, ou primitif. Le sens étymologique, ou primitif, du mot est souvent, dans l'état actuel de la langue, son sens essentiel. Le sens essentiel est habituellement caractérisé par sa stabilité, ce qui lui permet d'acquérir nombre d'acceptions secondaires, très mobiles, et de servir de base pour l'évolution sémantique des mots. Ainsi tout mot à plusieurs significations présente une unité dialectique d'éléments stables et instables. Les sens des mots se laissent classer d'après quelques types essentiels.
1) Tout mot polysémique possède un sens propre et des sens dérivés. Le sens propre d'un mot est celui qui ne se laisse historiquement ramener à aucun de ses sens actuels, alors que les sens dérivés remontent directement ou indirectement au sens propre. Le sens propre et les sens dérivés d'un mot ne peuvent être dégagés à la suite d'une analyse diachronique. Examinons en guise d'exemple le mot bouche ß lat. pop. bucca ; ses significations les plus importantes de ce mot sont: 1) cavité située au bas du visage et qui sert à parler, à manger; 2) ouverture (d'un four, d'un canon); 3) embouchure (d'un fleuve). Les deux derniers sens peuvent être historiquement ramenés au premier signalé ; ils doivent être considérés comme en étant dérivés. Il en va autrement pour le premier sens n'aboutit à aucun autre; ce premier sens sera le sens propre du mot bouche. Pourtant le sens propre d'un mot dans la langue moderne n'est point son sens primitif. Le sens propre est une catégorie historique. Il peut changer au cours de l'évolution du mot. Tel est précisément le cas du mot bouche qui désignait originairement, dans le latin populaire, «la joue»; c'était alors le sens propre du mot. La disparition du sens originaire de bouche, a été suivi du déplacement de son sens propre. Donc, le sens propre du mot est celui qui ne se laisse historiquement ramener à aucun de ses sens actuels, alors que les sens dérivés remontent directement ou indirectement au sens propre. Le sens propre et les sens dérivés d'un mot ne peuvent dégagés qu'à la suite d'une analyse diachronique.
2) Dans la synchronie on distingue le sens principal et les sens secondaires d'un mot polysémique. Le sens principal, étant le plus usité à une époque donnée, constitue la base essentielle du développement sémantique ultérieur du mot. Il peut coïncider tantôt avec son sens propre, tantôt avec le dérivé. Le sens propre du mot soleil - «astre lumineux au centre des orbites de la terre et des planètes» en est aussi sens principal; les autres sens de ce mot, tels que «pièce d'artifice qui jette des feux en forme de rayons» ou «fleur jaune, appelée autrement tournesol», sont à la fois des sens dérivés et secondaires. Il en est autrement pour le mot révolution dont le sens principal, en tant que terme politique coïncide avec un de ses sens dérivés (le sens propre étant «mouvement d'un corps parcourant une courbe fermée»). Le sens principal du mot comme son sens propre, est une catégorie historique. Jusqu'au XVI siècle le sens propre du substantif travai l- «tourment, chagrin, peine» était également son sens principal. Plus tard il s'est déplacé et a coïncidé avec le sens dérivé - «besogne, ouvrage». Puisque le plus employé, le sens principal dépend moins du contexte que les sens secondaires.
3) aussi les sens phraséologiquement liés s'opposent aux sens dits libres. Les sens propres des mots table, chaise, homme, animal, sont libres quant à leur faculté de se grouper, de s’employer avec d'autres mots. Par contre, le mot remporter qui s'emploie dans remporter un grand succès serait déplace dans remporter une grande réussite quoique réussite soit un synonyme de succès. On dit une question délicate, un sujet délicat sans qu'il soit possible de dire un récit délicat, un contenu délicat. Ch. Bally remarque qu'on dit désirer ardemment et aimer éperdument et non aimer ardemment, désirer éperdument. On peut choisir entre la peur le prit, la peur le saisit, la peur s'empara de lui, tandis que la peur le happa ou l'empoigna serait ridicule.
Cette tradition d'emploi des mots revêt un caractère national: elle n'est pas la même dans les langues différentes. L'équivalent russe de feuilles mortes sera «cyxue листья» et de fleurs naturelles - «живые цветы».
4) On distingue des sens syntaxiquement déterminés. Il suffit parfois d’un complément, d'une préposition ou d’un article pour changer le sens d’un mot. Comparez: sortir et sortir le mouchoir de la poche; tenir tête et tenir la tête, tenir qch et tenir à qch.